Noir silence ...

"Un grand soleil noir tourne sur la vallée, cheminées muettes, portails verrouillés, wagons immobiles, tours
abandonnées, plus de flamme orange dans le ciel mouillé" (Bernard Lavilliers, Les mains d'or)
Ce qui m'a le plus impressionné, après avoir assimilé le gigantisme du lieu, une
ancienne usine sidérurgique, c'est le silence. La taille des machines, leurs fonctions
supposées, leur aspect métallique, monolithique, permettent d'imaginer facilement le bruit
qui devait régner dans ce lieu en pleine activité. Chocs, grincements, grondements du
métal, cris des hommes pour tenter de se faire entendre. Tout s'est arrété un jour... La
fumée, la chaleur aussi ont disparu. La ville autour s'est endormie sur son passé industriel.
Aujourd'hui nous marchons entre ces monuments, sans un mot et c'est le silence qui
règne.
La promenade qui s'offre alors en devient étrange, comme si on ne se sentait pas
tout à fait à sa place, pas tout à fait légitime. Les machines dégagent une force, une
beauté brute, une esthétique luisante et huilée : des objets parfaits. Mais, il ne faut pas
oublier ce que travailler ici signifiait : de la souffrance, car les machines imposaient leur
rythme. Au delà de la souffrance quand le travail était une punition et une arme de
guerre...
Peu de lumière ici. Le noir est partout, le noir du charbon, des combustions. Le noir
du temps. Alors ces photos sont sombres, comme si elles s'éteignaient, comme s'il fallait
aller chercher ce que cache cette obscurité.